L'Incontinentia Pigmenti c'est quoi ?

L’Incontinentia Pigmenti

19 septembre 2022 Non Par jacques.monnet@orange.fr

L’Incontinentia Pigmenti (IP) est une maladie génétique rare et mal connue dite « orpheline », qui touche la peau, les dents, les yeux et le système nerveux central. C’est une maladie héréditaire dominante qui s’observe avant tout chez la fille. Son nom provient des anomalies observées dans la peau à l’examen microscopique (incontinence pigmentaire).

L’examen cutané permet le diagnostic. On constate l’apparition précoce de vésicules et de pustules comparables à celle de la varicelle, sur la peau du nouveau-né.

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Les symptômes les plus fréquents constatés de l’Incontinentia Pigmenti (IP) sont :

Des lésions cutanées constantes

  • Ce sont en premier des vésicules (petites cloques d’eau), voire des pustules (liquide blanc à l’intérieur de la cloque), qui ne sont pas d’origine infectieuse, et siègent volontiers aux extrémités (mains, bras, pieds jambes) du nouveau-né.
  • Elles sont présentes dès la naissance ou apparaissent au cours des 15 premiers jours et leur survenue chez un nouveau-né, généralement une fille, en bon état général, c’est à dire sans contexte infectieux, attire l’attention.
  • Ces lésions régressent spontanément, mais plusieurs poussées successives peuvent s’observer, et durer ainsi plus d’un an. Il est recommandé de consulter un dermatologue qui prescrira les traitements cutanés appropriés.
  • Les vésicules se transforment en lésions verruqueuses secondairement qui régresseront également.

Des anomalies dentaires observées dans 80% des cas

  • Ce sont principalement des dents coniques, pointues.
  • Dents absentes, ou dents surnuméraires.
  • La 2ème dentition sera suivie avec attention, car des soins dentaires spécialisés peuvent être nécessaires (orthodontie, prothèses).

Des anomalies de la chevelure

  • Présentes dans 50% des cas.
  • Le plus souvent, il s’agit d’une absence de cheveux (alopécie) au sommet du crane. Les cheveux peuvent être clairsemés dès l’enfance.
  • Il s’agit rarement d’un problème majeur.

Des signes oculaires

  • Dans 90% des cas la vision est normale.
  • Les bébés atteints d’IP doivent être examinés rapidement par l’ophtalmologiste à la recherche de prolifération vasculaire de la rétine et surveillés attentivement jusqu’à l’âge de 5 ans.
  • Dans certains cas, des troubles oculaires graves sont observés : décollement de rétine, cataractes, petits yeux, atrophie du nerf optique.

Des signes neurologiques

  • Présents dans 10 à 30% des cas.
    Ce sont des accidents vasculaires cérébraux avec leurs séquelles, convulsions, épilepsie, retard mental, troubles psychomoteurs.
  • Ils nécessitent dans les cas graves des prises en charge très lourdes.
  • Les convulsions sont précoces souvent avant l’age de 6 mois. Il n’y a plus d’apparition d’autres troubles après l’age de 1 an.
  • Heureusement ces formes très sévères neurologiquement sont les moins fréquentes, et sont habituellement observées dans les premiers mois de vie.

L’éruption cutanée est constante, parfois discrète, et sa découverte est parfois difficile dans les cas modérés et l’absence de signes cliniques ne doit pas éliminer le diagnostic d’Incontinentia Pigmenti (IP).

  • Les vésicules doivent être distinguées de celles de l’herpès, de l’eczéma, de la varicelle.
  • Une biopsie de la peau peut montrer des anomalies qui peuvent être caractéristiques.
  • Les tests biologiques découvrent la présence du gène anormal, confirment la clinique et sont une aide précieuse pour éviter la transmission de la maladie.
  • Les autres manifestations permettent surtout le diagnostic chez l’adulte (anomalies dentaires, alopécie comme l’absence de cheveux par plaques, prolifération vasculaire rétinienne, sont un complément important en particulier chez les mères ayant donné naissance à des bébés filles atteintes d’Incontinentia Pigmenti, ou bien si leur mère ou leur sœur sont atteintes, ou qu’elles ont fait des fausses couches répétées de fœtus de sexe masculin).

Certaines maladies, dont fait partie l’Incontinentia Pigmenti, sont dues à des gènes situés sur le chromosome X et sont donc appelées « maladies liées à l’X ».

Les femmes ont deux chromosomes X. Les hommes ont un chromosome X et un chromosome Y (celui qui détermine le sexe masculin).

Une femme atteinte d’Incontinentia Pigmenti a un chromosome X sain, et un chromosome X qui porte le gène muté. À chaque grossesse, elle transmet la moitié de son patrimoine génétique au fœtus. Ainsi, à chaque grossesse, le risque pour elle de transmettre le chromosome X porteur du gène muté est de 50%, quel que soit le sexe du fœtus.

Statistiquement, la moitié de ses filles hériteront du chromosome X sain, et seront donc indemnes, et l’autre moitié hériteront du chromosome X muté, et seront donc atteintes de l’Incontinentia Pigmenti comme leur mère.

La moitié des garçons recevra le chromosome X sain, et ils seront donc indemnes, alors que l’autre moitié recevra le chromosome X anormal. Or, comme les fœtus masculins qui n’ont pas un exemplaire sain du gène ne peuvent survivre au cours du développement embryonnaire, une fausse couche se déclenchera, où l’enfant sera mort-né.

Schéma explicatif de la mutation génétique

  •       Une fille saine : XX.
  •       Une fille malade : XX*.
  •       Un garçon sain : XY.

La combinaison « X* et Y »

  • Le gène muté est létal pour les garçons  (fausses couches, mort-nés).

Une mutation au niveau du gène Xq28 codant la protéine « NEMO » (NFkB essential modulator) entraîne un dysfonctionnement des processus inflammatoires, immunitaires et apoptiques (mécanisme de mort cellulaire). L’augmentation excessive de l’apoptose au niveau des cellules dermiques explique au niveau clinique, l’augmentation anormale et irrégulière de la pigmentation de la peau dans l’Incontinentia Pigmenti.

Pour être simple, on peut dire que NEMO est l’intermédiaire (le pont) entre les signaux extracellulaires et les facteurs de transcription intracellulaires.

La protéine NEMO fonctionne comme un interrupteur : lorsque la protéine est activée (allumée), elle stimule indirectement la réponse immunitaire et inflammatoire en empêchant l’apoptose, en favorisant la prolifération cellulaire et la production de protéines impliquées dans le combat contre les agents infectieux.

Cependant, si l’interrupteur demeure constamment allumé (ex : mutation), même en l’absence d’agents initiateurs, les activités cellulaires deviennent alors anarchiques et les risques de développer des tumeurs et des maladies inflammatoires augmentent de façon exponentielle.

Une autre image pour être celle du gène Xq28 ressemblant à un  « petit train » avec ses wagons et ses compartiments  (1,2,3,4… 10).

Dans l’ Incontinentia Pigmenti, la mutation du gène Xq28 entraîne « une perte des compartiments 4  et 10 » (délétion des exons 4 et 10).

Mutation géne Xq28 - Protéine NEMO (IKKg)

En fonction des atteintes, plusieurs soins sont possibles :

Dermatologie
Des désinfectants locaux qui évitent les sur-infections sont employés sur les lésions cutanées, ainsi que des anti-inflammatoires locaux.

Dentaire
Les dents seront surveillées et traitées surtout lors de la deuxième dentition.

Ophtalmologie
Au niveau de l’œil, la prolifération des vaisseaux de la rétine pourra être traitée par laser.

Neurologie
Le traitement des crises d’épilepsie et les autres troubles neurologiques relèvent des traitements adaptés.

Un groupe de travail est en projet afin d’étudier les formes d’épilepsie chez les enfants atteintes d’Incontinentia Pigmenti. Car le mécanisme de l’inflammation semble être différent de celui constaté habituellement dans les cas d’épilepsie.

Thérapie génique
La thérapie génique qui consisterait -dans les formes familiales- à greffer le plus tôt possible dans la vie embryonnaire sur le chromosome X* muté, le segment (4 et 10) disparu, ne paraît pas envisageable dans un proche avenir.

Visionner la vidéo (en anglais) ci-dessous, sur le mode de fonctionnement de la protéine NEMO (IKKg).
N’hésitez pas aussi à consulter la partie « Recherche » pour en savoir plus sur l’Incontinentia Pigmenti.

Le saviez-vous ?

Disponible depuis 2019, le Protocole National de Diagnostic et de Soins (PNDS) Incontinentia Pigmenti est un document capital pour les professionnels de santé dans la prise en charge de la maladie. Il regroupe des informations essentielles en matière de diagnostic, de conseil génétique, de traitements, de parcours de soin coordonné...
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